La cinéaste Agnès Varda est décédée à l’âge de 90 ans. Femme touche à tout, elle a marqué le cinéma français avec ses près de 65 ans de carrière.
Agnès Varda, l’une des rares réalisatrices de la Nouvelle Vague, est décédée vendredi 29 mars à l’âge de 90 ans. Née le 30 avril 1928, elle a grandi à Ixelles en Belgique puis dans le sud de la France à Sète.
Elle a commencé en tant que photographe avant de réaliser un premier court métrage en 1955, La Pointe courte, qui annonçait la Nouvelle Vague bien avant À bout de souffle de Jean-Luc Godard en 1960. S’en est suivi une trentaine de films, des courts comme des longs. On lui doit notamment Cléo de 5 à 7, Ulysse, Sans toit ni loi ou Les Plages d’Agnès.
Une carrière cinématographique récompensée
Avec ses œuvres, elle a marqué le cinéma français, ce qui lui a valu plusieurs reconnaissances. En 2001, elle a reçu un César d’honneur pour l’ensemble de son oeuvre cinématographique. Le Festival de Cannes lui a remis une Palme d’honneur en 2015, puis c’est au tour des Oscars de la récompenser avec un Oscar d’honneur en 2017, elle a été la première femme à recevoir cette distinction, sous une standing ovation.
Son dernier prix lui a été remis à la Berlinale en février 2019 où elle a reçu la Caméra de la Berlinale. Elle y présentait son documentaire Varda par Agnès.
Varda, l’oeil bienveillant de la caméra
Sa famille est souvent passée devant sa caméra, comme avec le documentaire sur son oncle Yanko (Jean Varda). Son mari Jacques Demy est évidemment passé devant sa caméra, que ce soit en fiction ou en documentaire, comme par exemple dans L’univers de Jacques Demy en 1955. Ses enfants, Rosalie et Mathieu ont eux aussi fait quelques apparitions dans les productions de leur mère.
Agnès Varda c’est aussi des acteurs, beaucoup ont fait leur premier pas sous sa direction. On pense par exemple à Philippe Noiret et Silvia Monfort dans La Pointe courte, Depardieu dans un film qui n’a finalement jamais vu le jour. Yolande Moreau, bien avant les Deschiens, dans 7 p., cuis., s. de b.,… à saisir ou encore l’acteur américain Harrison Ford pour des essais pour un film de Demy Model Shop, rôle qu’il n’a pas décroché.
Lors de sa carrière, Varda a toujours su s’entourer de ses amis. Alain Resnais, qui a fait le montage de La Pointe courte, apparaît furtivement dans Salut les Cubains. Varda, elle, apparaîtra brièvement dans un court de Resnais. Jean-Luc Godard est passé devant sa caméra, accompagné d’Anna Karina dans Cléo de 5 à 7 en 1962. Plus de 50 ans plus tard, c’est Agnès Varda qui tentera de rendre visite à Godard accompagnée de l’artiste JR dans Visages, Villages.
Varda c’est aussi des musiciens notamment Michel Legrand au piano dans Cléo de 5 à 7, des écrivains comme Louis Aragon et Elsa Triolet dans Elsa la rose. On peut aussi retrouver des chanteurs comme Jane Birkin et Alain Souchon récitant du Verlaine dans Jane B en 1988.
Femme et cinéaste engagée
Ses documentaires touchent à tous les sujets, des Châteaux de la Loire à la révolution de Fidel Castro à Cuba en passant par les Black Panthers.
Pourtant, Agnès Varda, c’est avant tout un regard sur les plus démunis. Elle a beaucoup filmé les inconnus, des ouvrières dans une usine de jouets dans L’une chante et l’autre pas ou des passants parisiens dans Cléo de 5 à 7. Elle porte une attention toute particulière au plus démunis, comme dans la fiction Sans toit ni loi avec Sandrine Bonnaire en 1985.
Féministe, elle signe en 1971 le Manifeste des 343, un appel à la légalisation de l’avortement. En 1977, elle sort son film musical sur le mouvement féministe, L’une chante l’autre pas avec Valérie Mairesse et Thérèse Liotard. À travers ce film, elle raconte l’émancipation des femmes durant les années 1960-70.
Femme pionnière de la Nouvelle Vague, Agnès Varda a filmé le temps sous différents angles, en l’imprégnant pour l’éternité. Varda, elle, a marqué le cinéma français pour toujours.
Margot Douétil