Les professionnels du secteur dentaire manifestent ce vendredi contre « la destruction massive » de la filière dentaire. Ils sont en désaccord avec la ministre de la Santé Marisol Touraine qui souhaite modifier les tarifs pratiqués par la profession.
Pour comprendre cette mobilisation, nous avons posé trois questions à Pierre-Jean Bérat, président du Syndicat national des internes en odontologie et interne des hôpitaux de Paris spécialiste en médecine buco-dentaire.
Depuis plus d’un mois, les étudiants manifestent notamment contre la proposition de l’Assurance maladie qui souhaite plafonner le prix des prothèses dentaires. Quel problème cela pose-t-il ?
Si on plafonne le prix des prothèses, il faut un véritable accompagnement de la sécurité sociale pour une vraie politique d’accès aux soins dentaires. Il y a un risque d’un système de soins à deux vitesses : ceux qui auront de vraies complémentaires auront accès à des soins de qualité et ceux qui n’ont pas les moyens devront aller dans des centres avec des soins low-cost, avec tous les drames que ça peut générer.
La convention, un contrat qui lie les dentistes et l’assurance maladie, a été reconduite en juin 2016 sans renégociations mais la ministre de la Santé a souhaité apporter des modifications. C’est ce que l’on appelle un avenant, c’est un patch correctif. Elle souhaite entre autres rendre opposables les prothèses dentaires. Or la sécurité sociale n’a pas suffisamment réinvesti dans les soins dentaires depuis une trentaine d’années. Cela a un impact sur le remboursement et le reste à charge des patients.
Quelles sont vos revendications ?
Il faut encourager les soins modernes et rendre les soins vraiment accessibles. Il y a beaucoup de personnes exclues des soins dentaires car cela leur coûte plus cher : les enfants, les personnes âgés, les personnes handicapées, …
Nous tenons à renforcer les soins de prévention, ce qu’on appelle les soins conservateurs. Nous demandons aussi un engagement de la Sécu. Les 800 millions qu’elle a promis ne sont pas suffisants, c’est seulement pour des revalorisations à la marge. Il faut investir entre 2,5 et 3 milliards. C’est un chiffre conséquent mais cet investissement donnerait une vraie accessibilité aux soins dentaires. Si non les dentistes devront acheter des prothèses moins chères fabriquées en Turquie, en Chine ou à Madagascar.
Toute la profession sera mobilisée cet après-midi, est-ce que vous avez espoir d’être davantage entendus ?
C’est vraiment l’ensemble de la filière qui sera présente. Il y a les étudiants, les trois syndicats professionnels – ce qui est un première historique – les prothésistes, …
Actuellement il y a un arbitre mobilisé sur la question. Il a rencontré au mois de février les représentants et il doit rendre un rapport vers le 7-8 mars sur les modifications possibles de notre convention. Le but de cette manifestation est donc que la ministre donne les moyens à l’arbitre de prendre les bonnes décisions.
Il faut montrer à la ministre qu’elle brade le système. Contrairement à ce qu’elle dit, ce n’est pas un combat d’honoraires. Marisol Touraine ne nous reçoit pas, pour le moment elle n’est pas très à l’écoute. J’espère qu’avec cette manifestation le message sera porté et entendu.