A trois jours de la Journée internationale des femmes, les militant(e)s latino-américaines parachèvent la politisation du féminisme. Une région du monde exemple qui se bat contre un machisme systémique.
Il y a encore du boulot. Voilà le triste constat des citoyennes chiliennes. A l’occasion de la promulgation d’une loi plus sévère sur les féminicides, le président Sebastian Piñera a choqué l’opinion publique en affirmant que « Parfois, il n’y a pas seulement la volonté des hommes de maltraiter (des femmes), mais aussi la position des femmes d’être maltraitées. »
Traversé par une crise sociale depuis quatre mois, le pays a pourtant fait de l’égalité homme-femme une priorité. En pleine procédure constitutionnelle, le Parlement déterminera le 26 avril prochain s’il remplace la Constitution sexiste de Pinochet de 1980, où le mot femmes n’apparaît qu’une seule fois dans le texte. Apparu lors des manifestations du mois de novembre 2019 à Santiago, le chant du groupe chilien Las Tesis, « Un violeur sur ton chemin », est devenu un hymne mondial contre les violences faites aux femmes.
Front uni sud-américain
La hausse du nombre de féminicides, de violences de genre et l’interdiction à l’avortement sont les principaux fers de lance des mouvements féministes sur tout le continent latino-américain. L’impunité judiciaire et la précarité sanitaire sont également dénoncées.
« Les mouvements féministes en Amérique latine sont très dynamiques, ils alertent, se mobilisent plus fortement que dans d’autres pays », souligne l’historienne Lissell Quiroz-Pérez. Les mouvements féministes vénézuéliens, largement réprimés, exigent quant à eux des chiffres officiels sur les féminicides. Alors que le président contesté Nicolás Maduro insiste sur la nécessité pour les femmes de « faire des enfants, encore et encore », aucune grande marche n’est prévue pour le 8 mars. Contrairement au Mexique, où les militantes appellent à la grève générale le 9 mars contre l’impunité qui entoure toujours les féminicides en nette hausse.
Le modèle argentin
« Pour l’autonomie de nos corps et contre les fondamentalismes religieux », telle est la devise de l’appel du collectif argentin Ni Una menos pour la Journée internationale de la femme.Dans le pays, le mouvement des « foulards verts » reprend son combat en faveur d’une légalisation de l’avortement, rejetée en 2018 par l’ancien président Mauricio Macri. Il rappelle qu’une cinquantaine de femmes enceintes meurent chaque année dans le pays des suites d’avortements clandestins. Le projet de loi doit en principe être voté cette année.
Le quotidien espagnol El Pais insiste sur le fait que ces mouvements féministes sont indissociables des luttes sociales qui remuent l’Amérique latine ces derniers mois, contre les inégalités, qu’elles soient de classes ou de genre.
Noémie Furling