L’Italie divisée au lendemain des élections législatives

Après une journée électorale aux résultats incertains, l’Italie se réveille sans majorité avec une coalition droite et extrême droite en tête avec près de 37%.

« Le Sud vote en masse pour le Mouvement 5 étoiles. La ligue fait une percée dans le Nord », résume le quotidien La Stampa, lundi 5 mars, au lendemain des élections législatives en Italie. Dimanche, les italiens ont été appelés aux urnes pour renouveler les 630 membres de la Chambre des députés et les 315 membres du Sénat pour les cinq prochaines années. Alors que trois formations se disputent le suffrage, aucune majorité n’a émergée.

La coalition formée par Forza Italia – le parti de Silvio Berlusconi -, La Ligue et Fratelli d’Italia (Frères d’Italie, ndlr) obtient près de 37% des suffrages. Le mouvement populiste 5 étoiles devient le premier parti du pays avec 31 % des voix. Le Parti démocrate (centre gauche) de Matteo Renzi paye l’impopularité de la politique de l’ancien Premier ministre, avec un résultat de moins de 20%.  

La fracture entre le Nord et le Sud

La fameuse « question méridionale » n’a jamais été autant d’actualité. Utilisé pour la première fois en 1873, le terme désigne le retard économique du Sud comparé aux autres régions de la péninsule. Plus d’un siècle après, l’écart persiste et le malaise se matérialise par le vote: selon une carte proposée par le site internet de La Stampa, le Mezzogiorno a majoritairement voté pour le mouvement populiste 5 étoiles. Lancé en 2009, le parti créé par Beppe Grillo – désormais dirigé par Luigi Di Maio -, mise depuis ses débuts sur la lutte contre la corruption et le chômage des jeunes.

« [Il y a ] une colère toxique à cause de l’appauvrissement, le chômage, la dégradation des périphéries, alors qu’un enfant sur six est touché par la pauvreté absolue » , fustige dans la rubrique opinion Il Corriere della Sera, pour expliquer la percée fulgurante du mouvement dans le Sud. Au Nord, sur sa terre de prédilection, l’ancien Premier ministre Matteo Renzi est le grand perdant de cette élection. L’ex figure emblématique de la gauche avait pourtant porté le PD à 40% en 2014, son plus haut niveau jamais atteint.

Le retour raté de Berlusconi

Si la coalition droite et extrême droite s’offre un score historique au Nord, le parti de l’ex-Cavaliere n’obtient que 14 % des suffrages, derrière La Ligue, avec 17,7% des voix. Pour la première fois, celui qui est surnommé « la mummia » par les médias italiens perd le leadership de la droite. « Nous avons été pénalisés parce que je n’ai pas pu me présenter en personne », a déclaré dimanche à ses collaborateurs le magnat des médias, selon des propos rapportés par la presse. A 81 ans, il est inéligible jusqu’en 2019 à la suite d’une condamnation pour fraude fiscale.

Malgré sa première place, la coalition n’atteint pas la majorité des sièges – qui est de 40% – et laisse un avenir incertain quant à la stabilité du gouvernement. Matteo Salvini, leader de la Ligue a affirmé, après l’annonce des résultats, que son parti avait « le droit et le devoir de gouverner ».

L’élection marque un tournant historique et témoigne de la crise de la sociale-démocratie qui balaye l’Europe. Dans un pays où le taux de chômage s’élève à 11,1% selon Eurostat (contre 8,7 dans la zone euro), la péninsule se tourne désormais vers les extrêmes. Historiquement attachée à la construction européenne, l’Italie connaît une poussée eurosceptique suite à la crise migratoire de ces dernières années.

Le président de la République Emmanuel Macron a d’ailleurs mis en avant lundi le contexte de la « forte pression migratoire »,  pour expliquer la victoire des partis populistes aux élections de ce dimanche.

 

Virginie Ziliani