La tension entre la Chine et les États-Unis n’est pas seulement aérienne, après la saga du ballon chinois, mais aussi sur le sol américain, qu’une élue du Texas veut protéger des convoitises chinoises.
Le ton monte d’un cran entre Pékin et Washington. Après l’épisode du ballon chinois, l’État du Texas se retrouve désormais au cœur des frictions. La républicaine Lois Kolkhorst, qui siège au Sénat de cet État du sud des États-Unis, a déposé en novembre dernier un projet de loi visant à y interdire l’achat de terres par tout citoyen chinois, mais aussi russe ou nord-coréen, pour des raisons de « sécurité nationale ».
« La sécurité nationale et le nombre croissant de propriétés acquises par certaines entités étrangères hostiles préoccupent de nombreux Texans », affirme Mme Kolkhorst.
Le gouverneur de l’État, Greg Abbott, lui aussi républicain et fervent défenseur des restrictions à l’immigration, est de ceux-là. Il a déjà promis de promulguer la loi dès qu’elle serait approuvée par le Sénat texan. « Un projet de loi a été déposé à la législature du Texas pour interdire aux citoyens, aux gouvernements et aux entités de Chine, d’Iran, de Corée du Nord et de Russie d’acheter des terres au Texas. Je le signerai », écrit-il sur Twitter.
Un projet de loi jugé discriminant
Quelque 1,4 million des 28 millions d’habitants de cet État se définissent comme asiatiques, dont 223.500 d’origine chinoise, selon les chiffres officiels. A Houston, ville la plus peuplée du Texas, ils sont plus de 156.000 à se dire asiatiques.
Or parmi eux, il n’y a pas seulement des Américains d’origine chinoise, mais aussi des ressortissants chinois détenteurs de la « green card », le sésame de résidence permanente aux Etats-Unis. « Tous ces gens paient des impôts et apportent une grande contribution (financière) aux universités », indique Ling Luo, directrice à Houston d’une association défendant les droits des personnes asiatiques aux Etats-Unis
« S’ils ne peuvent pas acquérir une propriété ici, c’est injuste, c’est une discrimination flagrante contre la communauté chinoise », ajoute-t-elle. Et même si d’autres nationalités sont visées, reconnaît-elle, la communauté chinoise est la plus importante.
Ce n’est pas la première fois que des minorités sont « diabolisées » aux Etats-Unis, souligne de son côté le démocrate Gene Wu, membre de la Chambre des représentants texane. En 1960, le Texas avait ainsi tenté de faire adopter une loi interdisant aux Chinois de posséder des épiceries, rappelle-t-il.
Le ballon de la discorde
Cet élu s’inquiète aujourd’hui du regain de tensions entre Pékin et Washington après l’épisode du ballon chinois, accusé d’espionnage par le gouvernement américain et finalement abattu samedi au large de la côte est, au terme d’un périple de plusieurs jours au-dessus du sol américain.
Dans un tel contexte, la proposition de loi de la sénatrice Kolkhorst s’en trouve renforcée, estime-t-il. Cette dernière considère qu’il est temps d’agir, après la tentative d’achat de 56.000 hectares, près d’une base aérienne, par un ancien officier de l’armée chinoise en retraite, qu’elle considère comme lié au Parti communiste chinois. Ce projet de l’ex-officier Sun Guangxin, qui voulait créer une grande ferme solaire et éolienne, a finalement été bloqué en 2021 par les autorités du Texas.
Une loi approuvée la même année empêche désormais les entreprises considérées comme liées au gouvernement chinois d’accéder au réseau électrique ou à des activités jugées stratégiques.
Selon l’élu Gene Wu, cette loi pouvait se justifier, mais pas celle aujourd’hui en discussion, qui vise les individus.
Pour l’Association nationale des agents immobiliers, les investissements chinois ont représenté entre mars 2021 et mars 2022 quelque 6% de toutes les transactions immobilières réalisées par des ressortissants étrangers aux États-Unis. Et ont surtout concerné la Californie ou New York, plus que le Texas.
Cet État n’est pas le seul à se préoccuper de l’intérêt croissant de ressortissants étrangers pour le foncier ou l’immobilier. Selon le New York Times, qui cite des sources officielles, au moins 11 États américains ont pour projet de réglementer de tels investissements.
La Californie, État démocrate, a adopté une législation en ce sens pour, dans un premier temps, mieux comprendre qui se cache derrière les acheteurs étrangers de terres, a expliqué la sénatrice démocrate de l’État Melissa Hurtado, citée par le quotidien new-yorkais.