Les Algériens ont commencé à se rassembler pour un 11e vendredi consécutif de manifestations, le dernier avant le début du mois de jeûne musulman de ramadan, durant lequel ils entendent continuer de protester pour démentir les craintes d’essoufflement du mouvement.
Un mois après la démission du président Abdelaziz Bouteflika, poussé au départ le 2 avril sous la pression de la rue et de l’armée après 20 ans au pouvoir, le mouvement de contestation ne faiblit pas.
Les manifestants entendent toujours obtenir le départ de l’ensemble du « système » au pouvoir et refusent que l’appareil hérité du président déchu, suspecté d’avoir truqué les scrutins depuis deux décennies, gère la transition et organise la présidentielle devant élire son successeur.
« On marchera jusqu’à ce que toute la bande des hommes à « Boutef » parte », dit Hamid Benmouhoub, commerçant de 55 ans, venu de Jijel, à 350 km d’Alger.
En tête des personnalités visées, le chef de l’État par intérim Abdelkader Bensalah et le Premier ministre Noureddine Bedoui, deux anciens cadres zélés du régime Bouteflika, extrêmement discrets depuis des semaines.
Ahmed Gaïd Salah, seule voix audible
Seule voix audible, en face des manifestants, celle du chef d’état-major de l’armée, le général Ahmed Gaïd Salah, devenu de facto l’homme fort du pays depuis qu’il a lâché M. Bouteflika, dont il était un indéfectible soutien.
Semaine après semaine, il appuie le processus de transition mis en place conformément à la Constitution, dont l’organisation de la présidentielle, convoquée le 4 juillet par M. Bensalah.
« Le dialogue ne peut pas se faire avec les symboles du système en place, qui détiennent le pouvoir », a réagi Abdelouahab Fersaoui, président du Rassemblement Action Jeunesse (RAJ), ONG citoyenne, dans un entretien au site d’information TSA (Tout sur l’Algérie).
« On ne peut pas entamer un dialogue avec un Bensalah ni avec un Bedoui ni avec les personnes qui ont été responsables de la situation actuelle », a-t-il estimé. Selon lui, le pouvoir continue « à manœuvrer et à gagner du temps » et « n’a donné aucun signe de bonne volonté pour répondre aux revendications claires et légitimes » du mouvement.
« On ne va rien lâcher »
Aucune partie ne semble prête à céder et certains observateurs pensent que le pouvoir mise sur un essoufflement de la mobilisation inédite déclenchée le 22 février, durant le mois de Ramadan qui commence dans les prochains jours.
Un mois de jeûne et de privation, durant lequel les Algériens se couchent souvent tard et au fur et à mesure duquel la fatigue se fait de plus en plus sentir.
« On continuera à marcher durant le ramadan pour exiger une période de transition avec des personnes propres, on ne va rien lâcher », assure, comme de nombreux autres manifestants, Zakia Benabdrahmane, 56 ans, arrivée à Alger avec son époux de Boumerdes, à environ 40 km à l’est de la capitale.
Pour pallier à la fatigue, la faim et la soif de la journée, la plupart des manifestants proposent de déplacer les marches le soir pendant le ramadan, après le « ftor », la rupture du jeûne.
Lydia Menez et AFP