Italie : le Mouvement 5 Etoiles expliqué en cinq points

Beppe Grillo, fondateur du Mouvement 5 Etoiles, en meeting. Photo : Creative Commons

Le mouvement antisystème, grand vainqueur des élections législatives italiennes, a souvent changé de ligne politique depuis sa création, il y a huit ans. La Feuille vous présente ce parti atypique.

Au lendemain des élections législatives en Italie, le Mouvement 5 Etoiles se profile comme la première force politique du pays. Avec 32,6% des suffrages obtenus (résultats partiels), la formation populiste espère former un gouvernement et promet une politique des « Italiens d’abord ». Une première dans le pays, réputé profondément europhile avant la crise migratoire. Alors, quelle est l’histoire de ce mouvement qui a bousculé le jeu politique en Italie ? Réponse en cinq points.

  • Un parti jeune, fondé par un comique

Habitué des spectacles comiques et des plateaux de télévisions, l’humoriste génois Beppe Grillo se lance dans la politique en 2009 en lançant le M5S. Les « cinq étoiles » font référence aux priorités du mouvement : retour au public de la gestion de l’eau, zéro déchets, transports publics, énergies renouvelables et wifi gratuit. Des thématiques qui sont chères au comique italien dont le discours faisait de plus en plus polémique à la fin des années 1990. Beppe Grillo crée alors son propre blog où il tient un discours antisystème qui pose les bases de son futur mouvement.

Le Movimento 5 Stelle (M5S) séduit les jeunes à son lancement grâce à un positionnement « ni droite, ni gauche » et des idées plébiscitées par cette tranche d’âge comme le revenu universel ou la démocratie participative que le parti adoptera comme mode de fonctionnement. Via une plateforme web, les adhérents peuvent orienter le programme du mouvement en s’exprimant sur les différentes mesures ou en choisissant les candidats présentés aux scrutins.

  • Programme multi-facettes

D’extrême droite ou d’extrême gauche ? Difficile à dire au vu des programmes successifs adoptés par le parti. « Au début, il a utilisé une rhétorique de gauche, contre la corruption, sur l’écologie, éclaire Rinaldo Vignati, chercheur à l’Istituto Cattaneo de Bologne, interrogé par Ouest-France. Mais sur d’autres thèmes, comme l’immigration, la fiscalité, l’euro, la rhétorique s’inspire de la culture de droite. »

Aujourd’hui, le M5S soutient la création d’un revenu universel et la lutte contre l’immigration massive. Malgré un discours très critique sur l’Union Européenne à ses débuts, le mouvement élude désormais le sujet, le responsable pressenti pour le secteur économie a d’ailleurs assuré qu’il n’était pas question d’en sortir. Un changement de cap probablement induit par l’arrivée de Luigi Di Maio à la tête du mouvement.

  • Nouveau leader, nouveau visage

L’ancien comique Beppe Grillo prend de plus en plus de distance avec le mouvement qu’il a fondé il y a moins de dix ans. Alors qu’il s’était déjà mis en retrait en 2016, il crée un nouveau blog au début de l’année où il supprime toute mention au M5S et parle de « nouvelle aventure extraordinaire, de libération, de fantaisie, d’utopie, de visions » comme le rapporte Le Figaro. L’ancien journaliste passionné de politique, Luigi Di Maio en profit alors pour prendre les rênes du parti dès septembre 2017 et entame un processus de « normalisation ».

Rejetant vivement le qualificatif de « populiste » qu’il considère comme péjoratif, il est à l’origine du changement de positionnement du parti au sujet de la sortie de la zone euro. « Jadis farouchement opposé aux “technocrates” de Bruxelles, le Mouvement 5 étoiles (M5S) se découvre donc européiste. C’est une des nouveautés apportées par Luigi Di Maio qui, pour se donner une chance de remporter les élections, a décidé de jouer la carte de la normalisation », précise Médiapart qui attribue la montée en puissance du parti à son jeune leader.

  • Des victoires électorales…

Le discours antisystème du M5S a un large écho auprès des classes populaires et les scandales de corruption qui éclatent dans les partis traditionnels contribuent à l’ascension du mouvement. Seulement trois ans après son lancement, il remporte une mairie aux élections municipales puis décroche une victoire fracassante aux élections régionales en Sicile un an plus tard. En 2013, le Mouvement 5 Etoiles entre au parlement avec 109 députés et 54 sénateurs dont nombre de très jeunes parlementaires après une campagne qualifiée de « tsunami ».

  • … et des scandales

Si le mouvement s’est fondé sur la critique des partis traditionnels italiens, quelques affaires lui collent aussi à la peau. Alors que le M5S demande à ses élus de reverser la moitié de leur salaire et primes à un fonds de solidarité permettant de financer des micro-crédits aux PME, plusieurs parlementaires ont trafiqué leurs notes de frais pour limiter leurs pertes. Luigi Di Maio avait alors évincé ceux qui avaient commis des fraudes supérieures à 800.000 euros.

La maire de Rome, Virginia Raggi, affiliée au Mouvement 5 Etoiles est, elle, passée devant les tribunaux après avoir été accusée de faux dans une affaire d’embauche. Elle a également fait l’objet d’une mise en examen pour corruption après la découverte de plusieurs assurances-vie souscrites en sa faveur par l’un de ses anciens proches collaborateurs. Le dossier a été classé sans suite mais ces différentes affaires ont contribué à dégrader l’image du mouvement, ce qui ne l’aura toutefois pas empêché de recueillir plus d’un tiers des voix aux dernières élections.

Margot Desmas