La Cour de cassation a confirmé que le lien unissant un chauffeur VTC à la plateforme Uber allait être requalifié en contrat de travail. Une décision lourde de conséquences pour le modèle économique de l’entreprise.
La plus haute juridiction de l’ordre judiciaire française a tranché. Les chauffeurs VTC devront être liés par un contrat de travail avec l’application de transport Uber. Pour la première fois en France, la Cour de cassation a reconnu « un lien de subordination entre le chauffeur et Uber lors de la connexion à la plateforme numérique, son statut d’indépendant n’étant que fictif ».
[Arrêt & communiqué] La Cour de cassation requalifie en contrat de #Travail la relation contractuelle entre la société #Uber et un chauffeur : https://t.co/cdNms18cJ4 pic.twitter.com/HjD9hWMO2x
— Cour de cassation (@Courdecassation) March 4, 2020
Le modèle économique de la plateforme est désormais remis en question. En effet, en la présence d’un contrat de travail, un chauffeur peut faire valoir ses droits régis par le code du travail. L’entreprise devra régulariser le statut de ses chauffeurs, comme s’ils étaient salariés depuis le début. Cela implique le paiement des cotisations sociales, des congés payés, des frais professionnels et le chauffeur pourra désormais bénéficier d’indemnité de licenciement. Cette décision signe aussi la fin des paiements à la course, le chauffeur devra être rémunéré avec un salaire fixe et minimum.
Des sanctions tarifaires imposées aux chauffeurs
La Cour d’appel avait fait le même constat, jeudi 10 janvier 2019, estimant qu’un « faisceau suffisant d’indices » était disponible pour pouvoir affirmer l’existence d’une relation contractuelle entre l’entreprise et ses chauffeurs auto-entrepreneurs. Uber avait fait appel une deuxième fois, pourvoyant le jugement en cassation.
Dans son arrêt, la Cour de Cassation explique qu’un chauffeur n’est pas dans la capacité de se constituer sa propre clientèle, ni de choisir les conditions d’exécution de sa prestation ainsi que ses propres tarifs. Elle reconnaît également que des conditions telles que l’application de sanctions tarifaires imposées en cas de non-respect de l’itinéraire donné ou la déconnexion temporaire d’un chauffeur à partir de trois refus de course, permettent à la plateforme de contrôler leur travail. La possibilité d’exercer des sanctions financières ne donne pas aux chauffeurs un véritable statut de travailleur indépendant.
649 millions de dollars réclamés à Uber dans le New Jersey
L’application s’est défendu en assurant avoir « apporté de nombreux changements pour donner aux chauffeurs encore plus de contrôle sur la façon dont ils utilisent l’application, ainsi qu’une meilleure protection sociale. Nous continuerons à les écouter et à apporter de nouvelles améliorations ».
Cet encadrement législatif a déjà été mis en place aux Etats-Unis dans l’Etat de la Californie. Encore récemment, le New Jersey a réclamé 649 millions de dollars à Uber pour combler les taxes que l’entreprise n’avait pas payé en considérant ses chauffeurs comme des indépendants. En Angleterre, les chauffeurs ont droit, depuis le 10 novembre 2017, à un salaire minimal ainsi qu’à des congés payés. Si Uber a affirmé que la décision de la justice française n’entraînerait pas de déqualification immédiate ou automatique du statut de ses chauffeurs, des changements devraient bien voir le jour prochainement.